La malédiction a encore frappé. Mais qu’ont donc pu faire de mal ces grosses institutions qu’on vénérait encore jusqu’à il y a peu comme des fleurons de la haute finance ?
Après sa soeur cadette Bears Stearns, dont j’avais amplement fait la nécrologie ici et là), Lehman Brothers n’est plus.
La prochaine ? JP Morgan ? Morgan Stanley ? Merril Lynch ? Allons, gardons le sourire, cela restera une belle histoire pour une saga au cinéma. Voilà encore une bonne illustration de l’intérêt de travailler dans la finance de marché en tant que salarié : rafflez le maximum pendant les années fastes ; lorsque les années de vaches maigres surviendront (par votre faute), vous n’aurez qu’à laisser vos congénères mourir de faim et, devant un bon repas, déplorer comme eux la situation.
The Associated Press – 13/09/08 à 13:35:20 – La banque Lehman Brothers va-t-elle passer le week-end?
Géant de Wall Street qui a lancé le commerce du coton aux Etats-Unis avant la Guerre de Sécession et financé un réseau ferroviaire qui aida à bâtir le pays, la vénérable banque Lehman Brothers pourrait bientôt tomber dans l’histoire. Dernière victime en date de la crise des prêts hypothécaires à risque, l’établissement a lancé une opération survie, mais il pourrait bien être dépecé d’ici dimanche soir.
« Rien, hormis un miracle, ne peut sauver Lehman en l’état », lance Anthony Sabino, professeur de droit et des affaires, qui ne donnait pas jusqu’à lundi matin à la banque…
Pour tenter de sauver Lehman Brothers, une réunion d’urgence s’est tenue vendredi soir à New York, avec des représentants des principales institutions financières américaines et le secrétaire au Trésor Henry Paulson.
Après les géants du refinancement hypothécaire Fannie Mae et Freddie Mac, la quatrième banque d’investissement du pays est en effet la dernière victime en date de la crise du crédit immobilier: après avoir résisté des mois durant à la tentation d’un rachat, elle a présenté un plan de restructuration et cherche désormais désespérément un repreneur.
Vendredi soir, alors que les spéculations et rumeurs allaient bon train dans la presse spécialisée, tout l’establishment financier du pays s’est retrouvé à négocier: outre le secrétaire au Trésor, étaient notamment présents le président de la SEC, la commission des opérations de bourse américaine, et celui de la branche new-yorkaise de la Fed. Selon le « Wall Street Journal », les dirigeants de Morgan Stanley et de Merrill Lynch assistaient aussi à cette rencontre.
Selon les observateurs, Lehman pourrait être dépecée, d’autres sociétés financières acquérant ses différentes activités. Son immobilier risque d’être vendu à perte…
Parmi les acheteurs potentiels, qui ont tous refusé de faire un commentaire, on avance les noms de la Bank of America, et à l’étranger, la britannique Barclays, la japonaise Nomura Securities, la française BNP Paribas ou encore l’allemande Deutsche Bank.
Vendredi, l’action Lehman a terminé à 3,65 dollars, un plongeon historique et humiliant de près de 95% sous son record de 67,73 dollars.
Fondée il y a 158 ans, Lehman Brothers est l’une des plus anciennes sociétés de Wall Street, finançant le coton d’Alabama, puis la construction du chemin de fer de Pennsylvanie, avant de bâtir sa réputation sur la gestion de bons du Trésor et autres valeurs.
Durant ses 15 années à la tête de la banque, son PDG Richard Fuld a étendu ses activités aux investissements financiers et à la gestion de fonds pour de riches clients. Mais en prenant de l’ampleur, la banque a également pris des risques, notamment sur les prêts hypothécaires. Et elle a été touchée de plein fouet par la crise du « subprime ». Au cours des seuls deux derniers trimestres, les pertes de Lehman Brothers ont grimpé à près de sept milliards de dollars (4,97 milliards d’euros).
Et dans son cas, la banque ne pourra pas compter sur le gouvernement: alors que les autorités avaient mis la main au porte-monnaie en mars pour permettre le rachat de Bear Stearns par JPMorgan Chase, Henry Paulson s’oppose totalement à un soutien à Lehman Brothers, selon une source proche du dossier. AP